Du rapport à l’erreur et à la vérité dans l’enseignement/apprentissage de l’improvisation au clavier

Du rapport à l’erreur et à la vérité dans l’enseignement/apprentissage de l’improvisation au clavier : le cas de la séance initiale d’une master class

Catherine Grivet Bonzon

RÉSUMÉ – Cette contribution s’intéresse à la prise en compte des erreurs des élèves dans l’enseignement de l’improvisation idiomatique au vibraphone. Par l’analyse didactique d’une séquence d’enseignement, nous nous demanderons si la transmission des compétences et savoirs musicaux spécifiques à cette pratique sociale de référence induit un rapport à l’erreur particulier de la part des acteurs dans leur relation, entre autres, à la « vérité de l’œuvre ».

MOTS CLÉS – didactique, musique, erreur, improvisation

Introduction

Improviser n’est pas un geste anodin. Si l’improvisation idiomatique 1 est soumise la plupart du temps à des règles et des lois harmoniques et rythmiques qui s’apprennent et donc, nous pouvons le supposer, se transmettent, il n’en est pas moins vrai que ce geste nous dit peut-être autre chose du musicien et de l’apprentissage que les autres formes musicales ne disent pas. L’improvisation, jeu en train de se jouer, conversation où l’on ne peut pas anticiper le discours de l’Autre, serait une forme où l’on « pardonnerait » l’erreur beaucoup plus facilement que dans d’autres genres musicaux. Le trompettiste Miles Davis n’aurait pas hésité à intégrer l’erreur au processus d’improvisation en affirmant qu’elle n’existe pas et que le destin d’une note dépend du contexte harmonique. Stefon Harris fait lui aussi la démonstration que la notion d’« erreur » en improvisation est fondamentalement différente de celle utilisée dans d’autres situations musicales. Pour le vibraphoniste de jazz américain, il y a erreur si la note proposée par un musicien n’inspire pas les autres, la déplaçant du côté de ceux qui n’ont pas pu saisir l’opportunité de la proposition. Il est certes plus aisé pour un virtuose que pour un élève débutant de pallier les fautes d’harmonie ou de rythme et de transformer l’« accident » dans un processus créatif, néanmoins il subsiste dans l’improvisation l’idée que le fait de « se tromper » n’est pas aussi rédhibitoire que dans d’autres esthétiques, en particulier les musiques savantes écrites où le rapport à l’erreur et donc à la vérité de l’œuvre, à la vérité de l’interprétation, place souvent l’élève face à la sanction du compositeur, du public, de l’enseignant ou de l’évaluateur lors des examens ou des concours.

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